L'Elixir d'Amour - Opéra Bastille

Publié le par Lwiss

Quatrième opéra de la saison à Bastille (le cinquième de la programmation de l'Opéra national de Paris), L'Elixir d'Amour, de Gaetano Donizetti, revient dans la mise en scène de Laurent Pelly, montée la première fois en 2006 dans le même opéra Bastille, avec une distribution à couper le souffle.

 

Pour la première fois depuis mon installation à Paris, j’ai testé les places à 5€ de l’opéra Bastille. Chaque soir, cette salle met en vente 62 places en fond de parterre. Le placement est libre, debout et les surtitres ne sont pas visibles. Comme toutes les places bon marché de l’Opéra National de Paris, elles sont vendues uniquement au guichet. Pour les obtenir, il faut faire la queue le jour même devant l’opéra Bastille et attendre l’ouverture des portes à 18h15 pour accéder aux bornes automatiques qui délivrent le précieux sésame. J’ai donc bravé le froid de 16h15 à 18h15 pour être parmi les 62 heureux élus du jour. Inutile de dire que ceux qui sont arrivés après 17h30 sont repartis bredouille. Par ailleurs, il ne restait pour cette représentation aucun billet à vendre à l’ouverture du rideau mais cela n’a pas empêché certains fauteuils de rester inoccupés et j’ai pu me glisser jusqu’au second balcon et j’ai donc assisté au spectacle assis, en voyant parfaitement la scène et les surtitres, tout cela pour cinq euros… et deux heures à grelotter dans le vent froid qui giflait les murs de l’Opéra.

 

En 2006, lors de la première série de représentation de cette production, les critiques avaient salué la mise en scène de Laurent Pelly, peu originale, il est vrai, en situant l’action dans l’Italie des années 1950, mais bien rythmée et assez enthousiasmante. Ce commentaire tient toujours puisqu’effectivement la création de Laurent Pelly et de Chantal Thomas (décors et costumes) est efficace, drôle, sans effets ni surprises mais laissant aux chanteurs l’occasion d’affirmer leurs voix et leurs personnages. La vraie différence avec la production de 2006 et sa reprise en 2007 est en fait à entendre. A lire les critiques de l’époque, le plateau vocal était assez peu réjouissant, si ce n’est un Laurent Naouri en Belcore bien inspiré. Cette fois, l’Opéra National de Paris s’offre une distribution fabuleuse avec Anna Netrebko en Adina et Giuseppe Filianoti en Némoirino. Toutefois, ces deux rôles sont tenus en alternance avec Tatiana Lisnic et Charles Castronovo (également à l’affiche de Mireille au palais Garnier). Jeudi soir, Filianoti était souffrant et c’est Charles Castronovo qui a pris la relève, constituant avec Netrebko un duo inédit.

Tous les ingrédients d’un spectacle exceptionnel étaient réunis et c’en fut un. Anna Netrebko est une soprano à la voix délicieusement légère et au vibrato envoûtant. Son jeu cabotin et malicieux dessine une Adina terriblement charmante qui aborde les nombreuses vocalises de Donizetti avec une facilité déconcertante. Face à elle, Charles Castronovo campe un Némorino timide et un peu benêt. Vocalement, le ténor fait preuve d’un jeu sensible et très expressif qui atteint une apothéose flamboyante dans son air Una furtiva lacrima, un moment de pure extase où l’on sent le public retenir son souffle jusqu’à la dernière note avant d’offrir une longue ovation. Les barytons ne sont pas en reste. George Petean ne nous émeut pas autant que les deux premiers rôles mais cela tient plus à son jeu d’acteur un peu pataud qu’à sa voix ; tandis que Paolo Gavanelli est un docteur Dulcamara hilarant, au timbre rond et aux accents badins. Dans la fosse, Paolo Arrivabeni, dirige rondement l’orchestre de l’Opéra National de Paris et tire de cette formation une interprétation précise et riche en couleurs. Musicalement, la seule déception vient du chœur qui montre quelques faiblesses rythmiques dans le premier acte avant de se rattraper, en particulier avec un bel ensemble de femmes au début du second acte.

 

Cette reprise de L’Elixir d’Amour est donc une occasion de passer une excellente soirée, riche en émotion, tant la sublime partition de Donizetti est enluminée par une distribution exceptionnelle.

 

 

L’Elixir d’Amour de Gaetano Donizetti

Mise en scène : Laurent Pelly

Décors et costumes : Chantal Thomas

 

Direction musicale : Paolo Arrivabeni

Chef de chœur : Alessandro di Stefano

 

Avec

Anna Netrebko (20 et 23/10) / Tatiana Lisnic (17 et 25/10)

Giuseppe Filianoti (20 et 23/10) / Charles Castronovo (17 et 25/10)

George Petean

Paolo Gavanelli

Jaël Azzaretti

 

A l’Opéra Bastille jusqu’au 25 octobre à 19h30 (sauf le 25/10 à 14h30)

Prix des places : de 5 à 172€

Publié dans Critiques

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